Dans une société où nous sommes toute la journée harcelées d’images parfaite…ment retouchées le rapport à notre propre corps parfait…ement imparfait peut-être compliqué !

Je suis bien placée pour en parler même si ce n’est pas le sujet que j’aime le plus aborder ici puisqu’il peut-être un peu « touchy » ; surtout publié entre deux autres articles sans aucun rapport. Mais malgré tout c’est quelque chose qui me tient à cœur… même s’il m’a fallu plus de deux ans pour pondre ce qui va suivre.

J’ai souffert pendant de nombreuses années d’anorexie-boulimie. Ce n’est pas un secret mais c’est quelque chose sur lequel j’essaie de rester discrète. Pas par honte, car c’est une maladie au même titre que toutes les autres, mais par pudeur et aussi pour me protéger du regard et du jugement des autres.

Cependant il me semble que lorsqu’on a la chance de pouvoir s’exprimer auprès d’une communauté de jeunes filles il faut parfois savoir parler d’autre choses que de chaussures dernier cri.

Tout le temps qu’a duré ma maladie je me suis sentie très mal dans ma peau : je souffrais de dysmorphophobie, comme une bonne partie des personnes atteintes de TCA (troubles du comportement alimentaire). L’idée c’est que le reflet du miroir me renvoyais l’image d’une énorme baleine échouée alors que mon IMC était bien en dessous de ce qu’il aurait fallu pour que je puisse vivre normalement ; je n’étais pas capable de me percevoir tel que je l’étais réellement. En plus de ça je devais apprivoiser mon corps entre mes prises et pertes de poids permanentes. Je pouvais prendre ou perdre jusqu’à 10 kilos en l’espace de 6 mois. Déjà que l’adolescence et l’entrée dans l’âge à adulte ne sont pas forcément des phases faciles, pour moi c’était carrément la cata.

Je flottais dans du 34 mais j’étais profondément malheureuse. Preuve en est, si vous en doutiez encore, que le tour de taille ne fait pas le bonheur.

Heureusement, grâce aux médecins, à ma famille et mes amis tout cela est derrière moi : aujourd’hui la baleine a disparue de la salle de bain (ndrl : la pièce ou se trouve l’unique miroir de mon appartement) et mon corps à repris un aspect normal : celui que la génétique m’a donné quand je suis à mon poids de forme (poids de forme = poids que l’on atteint quand on cesse de se priver et d’abuser, poids dans lequel on se sent bien !), un corps que j’assume aujourd’hui sans complexes  sans trop de complexes.

Le chemin n’a pas été particulièrement facile car même en allant mieux j’étais perpétuellement confrontée à ces images des magazines qui me renvoyaient au fait que je ne serai jamais exactement comme je pouvais le souhaiter, comme la société pouvait souhaiter que je sois.

Ces magazines qui éditent une fois par an un « spécial grandes tailles »mettant en scène une fille dépassant rarement la taille 40 et dont les moindre aspérités sont copieusement retouchées. Tout ça pour se donner bonne conscience et pouvoir continuer à parler de régime tout le reste de l’année nous incitant toujours plus à « faire attention » et à contrôler notre alimentation. Confrontée aussi à ces copines, collègues qui se privaient sans cesse, comptaient les calories et ne cessaient de parler de régime, de poids, de nourriture comme si leur vie tournait autour de la taille de leur tour de cuisses. Autant de choses qui me donnaient parfois envie de lâcher prise et de me remettre au régime salade-verte-concombre ad vitam eternam ( à moins d’apprécier de vous transformer en légume je ne vous conseille pas du tout ce régime ! )

C’est à ce moment là que j’ai pris conscience de la place que tient le poids dans la vie de beaucoup de femmes : cette obsession dicte leur menu, leur emploi du temps, leur style, leur mode de vie et même leur humeur. Et ce au mépris total de leur morphologie. Certaine filles sont naturellement minces, voir très minces, mais certaines filles sont aussi naturellement plus rondes. C’est ainsi. Alors au lieu de chercher à contrarier la nature autant garder son énergie pour apprendre à s’accepter et bouger-manger convenablement c’est à dire sans restriction ni excès.

Dans le monde de la mode dans lequel je travail c’est pire, parce que nous sommes au contact permanent de cette représentation du pseudo « corps parfait« , avec les prototypes de vêtements uniquement disponibles en S et des mannequins….  qui malheureusement restent pour la plupart vraiment maigres, malgré le récent décret photoshop, et la loi dites mannequin : une loi mannequin qui n’oblige les filles à se rendre chez un médecin qu’une fois tous les 6 mois… 6 mois !!! Il n’en a fallu que 2 à Victoire, auteur de « Jamais assez maigre« , qui dénonce le diktat de la maigreur chez les mannequins, pour en perdre 10 !!

Inconsciemment nous sommes trop souvent amenés à nous comparer à cette vision du corps qui est la seule qui nous est proposée. Quand tout va bien on passe au dessus, mais pour ces filles plus fragiles, mal dans leur peau, comment ne pas être atteinte par ces kilomètres de jambes et de ventres ultra-plat ?

La société actuelle se refuse encore trop à présenter une réelle diversité de la beauté : le canon, en France et ailleurs reste majoritairement celui d’une fille grande, mince et caucasienne. Pourquoi ? Pourquoi stigmatiser ainsi les formes et prendre le risque d’influencer encore un peu plus des filles déjà mal dans leur peau ?

On ne devient certes pas anorexique parce qu’on a lu un magazine de mode ou regardé un défilé en direct, cependant, l’influence de ces images banalise la maigreur maladive de façon tout à fait malsaine.

Le sujet me tient particulièrement à cœur ; j’aimerai tellement que les choses bougent, voir des vraies filles sans retouches ( la retouche est toujours autorisée : la seule obligation est de le mentionner ) et une réelle diversité de forme, de peau, de taille… histoire qu’on s’y retrouve toutes !

Aujourd’hui je pèse presque 10 kilos de plus qu’il y a 3 ans. Mais je ne perds plus mes cheveux, mes ongles ne se cassent plus et je ne tombe plus dans les pommes en pleine rues tous les 4 matins. J’ai renoué avec le plaisir de manger du chocolat et du fromage fondu à la cuillère et je ne me suis jamais sentie aussi bien.

Alors souvenez vous que :

« Toutes les femmes sont belles 
Et méchantes et cruelles 
Mais elles nous font si bien l’amour 
Que Dieu leur pardonne 
D’avoir brisé des hommes 
Qui n’pensaient qu’à  leur faire l’amour. »

( Je termine en citant Michou pour détendre un peu l’ambiance !)

 

 

 

 

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Crédit photo : Beaauuu Paris

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6 commentaires

  1. Ahh ma belle Mathilde ! Moi, j’aime te voir traiter des sujets plus sensibles (touchy). Je n’imagine pas le quart de ce que tu as pu traverser, heureuse que cela soit derrière toi. Merci pour cette bouteille jetée à la mer pour aider celles qui traversent ou on traversé une expérience similaire. Bravo !

  2. Tellement heureuse de lire ça , nous qui luttons depuis 3 ans contre cette maladie qui touche notre aînée de 22 ans … merci

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